Le 20 mai dernier, le ministre de l’Intérieur, Tjahjo Kumolo, a déclaré que l’obligation de la mention de l’appartenance religieuse sur la carte d’identité nationale était supprimée. Désormais, a-t-il précisé, les citoyens indonésiens pourront laisser un blanc en face de la rubrique ‘religion’ de leur document d’identité ou inscrire la religion de leur choix, y compris si celle-ci ne fait pas partie des six religions officiellement reconnues.
Ce faisant, le ministre de l’Intérieur a tranché un débat récurrent depuis des années en Indonésie, à savoir si cette obligation de mention de la religion sur les documents d’identité était ou non une mesure contribuant à la défense de la liberté religieuse. La mesure étant très sensible, le ministre a pris soin de la présenter comme étant de nature « administrative » et qu’elle avait reçu l’assentiment du ministère des Affaires religieuses ainsi que celui du MUI, le Conseil des oulémas d’Indonésie. Il y a quelques mois, peu après sa nomination au poste de ministre de l’Intérieur au sein du cabinet nouvellement formé du président Joko Widodo, Tjahjo Kumolo avait déclaré que « si [l’Indonésie] protège les religions pour le bien du peuple, le pays n’était ni un pays laïque ni un pays fondé sur la religion ».
La mention obligatoire de la religion sur la carte d’identité (KTP, Kartu Tanda Penduduk) n’a pas toujours eu cours en Indonésie. Elle remonte au régime de l’Ordre Nouveau du président Suharto (1966-1998) et avait été instaurée alors que chaque Indonésien devait fournir la preuve qu’il n’était pas communiste ; les communistes étant supposés athées, les Indonésiens, en indiquant sur leur carte d’identité, leur appartenance à l’une des cinq religions reconnues (islam, hindouisme, bouddhisme, protestantisme et catholicisme), montraient ainsi leur non-appartenance au communisme. En janvier 2000, à titre de geste de considération envers la communauté sino-indonésienne, le confucianisme avait été ajouté à cette liste des religions officiellement reconnues. Et il existe également une septième possibilité (s’inscrire sous l’intitulé « autre » à la rubrique ‘religion’) afin de permettre aux tenants des aliran kepercayan (‘croyances traditionnelles’, à savoir les animistes) de se doter d’une carte d’identité sans avoir à se reconnaître dans l’une ou l’autre des religions officiellement reconnues.
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