Loin de l'image du dîner aux chandelles et des mots doux, la Saint-Valentin a longtemps été célébrée par des viols et des violences faites aux femmes.
Qu'est-ce que la Saint-Valentin? "Une fête commerciale", répond Alya. "La fête des gens qui s'aiment", rétorque Catherine. "Un jour comme un autre", tranche Alex. Depuis une soixantaine d'années, le 14 février est tantôt considéré comme conformiste et dépassé, tantôt perçu comme une occasion de montrer son affection à l'être aimé.
A travers le monde entier, des amoureux s'offrent des fleurs, de la lingerie ou des mots doux. Ils ignorent, pour la plupart, les sombres prémices de cet événement. Pourtant, à l'heure de #MeToo et de #BalanceTonPorc, cette tradition résonne plus que jamais avec un passé où violences sexuelles et sexistes étaient normalisées.
Viols collectifs et chasse aux femmes
"Saint-Valentin n'y est pour rien dans la création de cette fête. Son histoire est une légende créée de toute pièce", prévient Jean-Claude Kaufmann, auteur de Saint-Valentin, mon amour!. "Le 14 février correspond à la date de sa mort. Ce jour a été repris plus tard par les autorités morales et religieuses pour lutter contre ces festivités", résume le sociologue.
Et pour cause, lorsque l'Église commence sa guerre aux "fêtes de février", ce ne sont pas des bouquets de fleurs que les hommes offrent aux femmes, mais des coups de fouet. L'objectif, disent-ils alors, est de les rendre plus fécondes et de les purifier en frappant leurs corps nus. "Ces célébrations étaient très violentes vis-à-vis des femmes", note le chercheur, citant les "fêtes de l'ours" des régions boisées du continent.
Dans cette Europe médiévale, les hommes se déguisent chaque année en ours pour "chasser" les femmes sur les places publiques afin de les amener dans leur "tannière" pour leur faire subir toutes sortes de choses, dont des viols. Plus que toléré, ce type d'agissement est alors perçu comme une évolution positive des célébrations de février, la tradition précédente étant plus tournée vers le viol collectif des jeunes filles.
"Avant les fêtes de l'ours, il n'était pas rare que de jeunes hommes désignent une "ribaude" [débauchée], accusée d'avoir adopté une attitude séductrice -en souriant, par exemple. Ils se rendaient donc chez elle la nuit et s'arrogeaient le droit de pénétrer de force dans sa chambre pour la violer. Ils repartaient en lui laissant une poignée de pièces, symbole de sa nouvelle vie de prostituée", raconte le professeur. Selon l'historien Jean-Louis Flandrin, près d'un jeune homme sur deux participait à des viols collectifs, sans être jamais sanctionné. "La culture du viol est un héritage direct de ce passé", analyse Jean-Claude Kaufmann. Lire la suite.