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Gaza, Jérusalem: l’embarras des Etats africains

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Depuis le début de la semaine, Israël fait face à une vague de condamnations internationales après le bain de sang dans la bande de Gaza où 60 personnes ont été tuées dans la répression féroce par l’armée des marches palestiniennes vers la frontière. Dans ce concert de protestation, le silence de la plupart des Etats africains traduit un certain malaise des chancelleries autour de la question palestinienne. Un silence qui a deux causes principales : les pressions américaines et le travail au long cours de la diplomatie israélienne.

Tout accaparés qu’ils étaient par le couple glamour Ivanka Trump - Jared Kushner, conseillers et émissaires du président américain à l’inauguration de l’ambassade des Etats-Unis à Jérusalem, les photographes auront probablement manqué la présence parmi les dignitaires d’une dizaine de représentants de pays africains. Alors que la cérémonie battait son plein, des milliers de manifestants palestiniens étaient au même moment pris sous le feu de militaires israéliens protégeant à balles réelles la frontière entre l’Etat hébreu et la bande de Gaza à une centaine de kilomètres de là. Des violences qui ont provoqué une vague de condamnations internationales.

Mais en Afrique ces condamnations ont été plutôt rares. L’Afrique du Sud a rappelé son ambassadeur. Le président de la commission de l’Union africaine s’est fendu d’un communiqué dans lequel il condamnait « l'usage disproportionné de la force par l’armée israélienne ». Moussa Faki Mahamat, qui soulignait « que la relocalisation de l'Ambassade des États-Unis à Jérusalem ne peut qu'aggraver les tensions dans la région ». De son côté, le Sénégal a appelé « la Umma islamique et les Nations unies à se mobiliser pour mettre fin à cette tragédie humaine ». Et Macky Sall de réaffirmer son « ferme attachement aux droits légitimes de nos frères et sœurs de Palestine à un Etat indépendant et souverain avec Al Quds Al Sharif [Jérsualem NDLR] pour capitale ». Le président sénégalais s’exprimait lors d’une réunion du Comité des affaires culturelles de l’Organisation de la coopération islamique (OCI) à Dakar.

Le Sénégal et Israël ont des rapports en dent-de-scie. Les relations diplomatiques entre les deux pays avaient été rompues en décembre 2016 quand Dakar avait obtenu du Conseil de sécurité des Nations unies le vote d’une résolution interdisant la colonisation en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. Le réchauffement s’était opéré six mois plus tard à l’occasion du sommet de la CEDEAO qui devait consacrer le retour du Maroc dans l’organisation ouest-africaine. Mais le roi avait annulé sa venue en raison de la présence au sommet du Premier ministre israélien Benyamin Netanyahu.

« Les Africains observent »

Lundi, Mohammed VI, en sa qualité de président du comité Al Quds de l’OCI, chargé notamment de suivre l’évolution de la situation de Jérusalem, s’est d’ailleurs exprimé sur le transfert de l’ambassade américaine, réitérant son « rejet de cet acte unilatéral, contraire à la volonté de la communauté internationale ». Mais rien sur les violences à Gaza.

La Ligue arabe qui compte parmi ses membres une dizaine d’Etats africains se réunit ce jeudi 17 mai au niveau ministériel après avoir déjà appelé la Cour Pénale internationale (CPI) à ouvrir une enquête. Quant à l’OCI, qui compte en son sein 25 pays africains, elle convoque une réunion extraordinaire vendredi. Mais en attendant, les capitales africaines se sont illustrées par leur silence. « Pour l’instant les Africains observent et estiment que peut-être, ce n’est pas à eux de faire le premier pas. Ils attendent que la Ligue arabe se manifeste avant d’emboîter le pas », commente Alhadji Bouba Nouhou, enseignant à l’université de Bordeaux-Montaigne. Alors pourquoi ce malaise sur une question palestinienne autour de laquelle l’Afrique a longtemps fait bloc ? « C’est une faiblesse de notre diplomatie multilatérale. Quand il s’agissait du régime d’apartheid sud-africain, de la Namibie et d’autres questions, l’Afrique était presque unanime. Aujourd’hui ça s’est bien effiloché à cause des pressions des Etats-Unis et d’Israël », estime le diplomate sénégalais Falilou Kane, ancien ministre et ancien président du Comité des droits des Palestiniens à l’ONU. Quand les Etats-Unis vous disent "Si vous votez contre moi je vous coupe les vivres", il y a beaucoup de pays qui, au maximum, vont s’abstenir ». Le désintérêt de l’administration Trump pour l’Afrique coïncide avec un intérêt croissant des Israéliens pour le continent. « Depuis l’arrivée de Donald Trump au pouvoir, on voit bien que la politique israélienne semble se coordonner avec la politique américaine, et pour la majorité des Etats africains -- notamment confrontés à des problèmes sécuritaires l’accès à la porte des Américains passe par le biais israélien », selon Alhadj Bouba Nouhou.

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